jeudi 15 mai 2014

Servian hors saison (3)






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 Je me retrouve sur la grand place encombrée de voitures. Je me perds vite en terrain de connaissance rue du commerce, rue des Quatre-Vents et son panorama sur la campagne.




                   rue du Commerce




                     vue de la rue des Quatre-vents

Et voici la rue des patineurs où mon père ruinait ses fonds de culotte à y glisser avec ses camarades de jeux lors de rudes hivers. Compte tenu de la configuration du village la rue des patineurs ne devait pas être la seule rue où pratiquer ce sport de glisse. Mon père a toujours affirmé que la rue tirait son nom de ces amusements sportifs d’enfants. Il semblerait plutôt que la présence ancienne d’artisans y effectuant des patines soit à l’origine de ce nom, mais je lui préfère la légende forgée par mon père.


                   rue des Patineurs

Rue Victor Hugo l’ancienne maison de mon cousin André est fermée. Il me semble pourtant y entendre encore des voix familières, les cris des enfants, les aboiements de chien. Seulement le silence. Je me retrouve rue Jules Bournhonnet.


                      rue Jules Bournhonnet

C’est là que mes parents avait fait l’acquisition en 1968, d’une maison sans charme, une maison qui n’a jamais trouvé grâce à mes yeux. Adolescent,j’étais à la charnière de deux vies et cette maison n’avait pas l’enchantement de celle de ma grand-mère. Et puis mon père y est mort. Il est mort trop tôt sans que nous ayons eu le temps de nous dire des choses. Qu’il me parle de Servian, de sa famille, évoque ses souvenirs. Mais l’aurions nous fait ? Il était de ces gens à taire la mémoire et les secrets de famille. Il n’échangeait rien. Cette maison n’a jamais gravé de liens affectifs au fond de ma mémoire. Mais de la revoir aujourd’hui avec ses volets fermés n’est plus pareil. J’entends les cris absents des enfants qui traversent un goulet de tuyaux rejoindre le boulevard de la Lène à côté.


                      rue Armand Fallières

Dans le prolongement de la rue Jules Bournhonnet suit la rue Armand Fallières, ancienne rue de Launas, un des noms occitans de la Lène, rebaptisée du nom du président de la république venu au village constater le désastre des inondations de 1907.



rue Armand Fallières

Au 12 de cette rue je m’adosse contre le mur d’en face et regarde la porte de ce qui fut la maison de ma grand-mère. Il y a un papier agrafé sur le bois. Nicolas et Laetitia, les deux prénoms séparés d’un attendrissant petit cœur. Je lève les yeux vers la terrasse. Des suspensions abritent quelques plantes et je devine la structure d’une pergola pour la protéger des fortes chaleurs d’été. 


                           Rue Pasteur

En remontant vers la place, c’est à l’angle de la rue Charles Reboul et de la rue Pasteur, qu’armé de mon étrange boite à images et de mon appareil photo j’ai délié la langue d’un curieux.

Et nous voilà à bavarder tandis qu’il attend sa mère pour l’emmener partager le repas dominical. Je lui donne la raison de ma présence ici. Il est surpris de la raison de ce « pèlerinage ». Il me demande sans ambages qui je suis. Je lui réponds. « Vous êtes de la famille d’Antoine ? me questionne-t-il étonné. – Je suis son fils, le plus jeune. » Son visage s’éclaire soudain et Il me serre chaleureusement la main. « J’ai bien connu votre père. » Malgré quelques cheveux blancs cet homme est loin d’avoir atteint un âge canonique, bien au contraire. Il à l’air encore jeune. Il est de la classe 58 comme il me dit. A la disparition de mon père en 1982 il avait vingt-quatre ans. « Votre père était un grand sportif en athlétisme. Avec Jacques, vous connaissez Jacques, son neveu, ils ont beaucoup fait à Servian pour le rugby en faveur des jeunes. » Première nouvelle. Je savais mon père très attaché à ce sport mais pas à ce point. Je lis dans ses yeux qu’il jugeait mon père comme un type bien et n’en suis pas peu fier. « D’ailleurs durant quelques années il y a eu à Servian un challenge de rugby qui portait son nom.» Et il me laisse avec cette soudaine révélation continuer mon chemin rue Pasteur, frôler le fantôme de l’épicerie Rossignol et débouche face à l’église pour gagner la place.




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