dimanche 6 décembre 2009

Papaver somniferum

Il s’en passe de belles en pleine nuit dans les sous-sols de l’hôpital Lariboisière. Tandis que les rats en profitent pour faire une sarabande malicieuse entre les lits des opérés dans la salle de réveil, les dalles en pierre de taille se décèlent une à une pour laisser sortir des ossuaires des dizaines de Tchétchènes. Rosiane les a identifiés immédiatement en les entendant parler cette langue caucasienne de la gare du nord le Нохчийн мотт, langue nakho-daghestaniennes qu’elle a étudiée avec Georges Dumézil et dont elle est diplômée universitaire.
Comme le dit le proverbe là où il y a du Tchétchène il n’y a pas de plaisir, elle s’est donc décaniller vite fait avec son lit à roulettes pour regagner sa chambre à l’hôpital St Louis. Pour ceux qui ne connaissent pas Paris, Lariboisière, St Louis à la force des bras sur lit à roulettes datant de Louis XIV, c’est pas gagné. Mais notre Rosiane à du caractère et beaucoup de courage, elle y est arrivée. C’est le propre des héros de réussir là ou le simple mortel échoue. Et Rosiane c’est un peu notre Hercule à nous. Que d’épopée.
Enfin sa chambre elle l’a retrouvée. Et décorée figurez-vous avec de jolies ballons multicolores au plafond et des petits-fours sur la table et ses filles qui discutaient avec des membres de la famille et une flopée d’autres invités à te faire un tintouin de tout les diables. « Non mais des fois, voyez bien que je suis malade ! Vous vous croyez où ? C’est pas un dancing ici, c’est un hôpital. Allez, tout le monde dehors ! » On a flippé un max devant cette colère homérique et on s’apprêtait à quitter la chambre quand les flics sont arrivés pour embarquer Rosiane au ministère de l’Intérieur place Beauvau. On s’est carapaté vite fait pour la laisser de démerder toute seule avec le Brice certainement à propos de cette affaire de Tchéchènes. Rosiane devait en savoir plus qu’elle n’en avait l’air. Ce n’est pas pour rien qu’elle s’était trissée de Lariboisière. Bien entendu à l’hôtel Beauvau, ils on eu beau pousser à droite, pousser à gauche, tirer, forcer, lever, reculer, quand ça rentre pas, ça rentre pas. Pourtant les portes sont grandes. Mine de rien, un lit à baldaquins datant de Louis XIV ça te prend une de ces places. Et Rosiane qui gueulait qu’elle venait d’être gravement opérée et qu’elle n’avait rien à foutre à l’hôtel Beauvau. Et Rosiane quand elle gueule, elle gueule. Alors les flics en sueur on été obligés d’abandonner. Et elle s’est retrouvée dans sa chambre à St Louis avec l’équipe de nuit à raconter son escapade avant de sombrer à nouveau dans le sommeil.
Voilà ce qu’elle nous a raconté quand nous sommes passés lui rendre visite l’autre soir. Il y avait encore quelques ballons et des restes de petits-fours sur la table. Le décor des lendemains de fête.
Quant à moi, face à ce monde de merde, je me demande si je ne vais pas me mettre à la Morphine.

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